Un jour noir pour la République, un jour béni pour l’extrême-droite ?
Selon un sondage de Public sénat publié en avril 2022, 42% des électeurs de Macron l’auraient choisi pour faire barrage à l’extrême droite. Un an et demi plus tard, le constat est pourtant sans appel : 2023 est l’année des lois les plus répressives de l’histoire de la Vème République.
Dans la foulée de la loi retraite et de la loi plein emploi attaquant le droit au RSA, une semaine avant les fêtes habituellement marquées de quelques menus principes de solidarité et de convivialité, la loi immigration, durcit le droit du sol, l’octroi de l’aide médicale d’État et de titres de séjour, le droit des étudiants étrangers, les critères de perception des aides sociales, la régularisation des sans-papiers…. La victoire idéologique de la « préférence nationale », concept cher au Rassemblement National, rompt avec le principe d’universalité au cœur du système de sécurité sociale et des fondamentaux de toute organisation sociale se réclamant de la déclaration des droits humains. L’État social n’en finit plus de détruire les conquis des travailleurs et travailleuses.
Cette loi raciste visant explicitement les étrangerEs ramène en plein jour une réalité des systèmes alimentaires : une partie du travail agricole et du secteur agro-alimentaire est effectuée par des exilé-e-s dont un certain nombre sont sans papiers.
Déjà, en décembre 2012, dans un éditorial du Forum Nyélini (Mouvement international pour la souveraineté alimentaire), on pouvait lire: » Les migrants […] sont forcés de quitter leur pays pour échapper à la pauvreté et à la faim. A cause des politiques d’immigration à caractère racial et de la militarisation des frontières, ces migrants risquent de plus en plus souvent leurs vies pour franchir des frontières sans papiers d’identité. De plus en plus de migrants sans papiers sont persécutés et criminalisés, tout en étant exploités par le système de production alimentaire, auquel ils sont indispensables, voire travaillent pour celui-ci dans des conditions proches de l’esclavage. La lutte contre la mondialisation de la production alimentaire est aussi une lutte pour défendre les droits des migrants« .
Cette loi attaque directement les principes politiques de solidarité, d’universalisme et d’accueil inconditionnel, ainsi que de l’article 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme consacrant le droit au respect de la vie privée et familiale.
Son adoption confirme la volonté affichée d’en finir avec l’idéal de la Sociale.
Il ne nous fait pourtant pas oublier Ambroise Croizat, ouvrier devenu Ministre du travail en 1945 et fondateur de la sécurité sociale en 1946, qui mettait l’État au service du peuple, permettant simplement au travailleurs et travailleuses de gérer leurs propres cotisations, sans ingérence de sa part. Les attaques de l’État social au service des capitalistes contre la sécurité sociale sont des attaques contre la solidarité et l’entraide, principes par nature opposées au capitalisme et mis en place à l’origine pour s’en protéger.
Ce que Darmanin voudrait encore faire passer pour une avancée, si l’utilité justifiait le sens de l’accueil, c’est la régularisation facilitée des travailleurs sans-papiers dans les métiers en tension. « Contrôler l’immigration, améliorer l’intégration ». Mais il s’agit avant tout de satisfaire les besoins en main d’œuvre dans les secteurs qui peinent à recruter, en raison de conditions de travail éprouvantes, à bas salaire (restauration, aide-soignant…), voire dangereuses (BTP). Et si le travail devait apporter l’assurance d’obtenir des papiers, ce sont des milliers de personnes qui seraient régularisées depuis bien longtemps déjà.
Assujettis à la tyrannie du fascisme libéral, nous sommes de plus en plus réduit-e-s en simples capitaux humains, qu’il s’agit de réguler en fonction de la loi de l’offre et de la demande.
Le Collectif pour une Sécurité sociale de l’alimentation dénonce cette loi et est solidaire des actions menées par la Marche des Solidarités réunissant les collectifs de sans papiers, les syndicats, les associations et collectifs du mouvement social. Nous réaffirmons notre volonté de proposer universellement, démocratiquement et solidairement une sécurité sociale de l’alimentation, ainsi que des lendemains réellement désirables, où chacun.e trouve sa place et se sente légitime à participer collectivement à l’édification d’un monde plus juste et authentiquement inclusif, d’une société où il fait tout simplement bon vivre, d’où que l’on vienne, où que l’on soit né·e !